REBELLES au CINÉMA





Vendredi 4 Février 2011 à 20h00

Soirée d'Ouverture du Cycle
en présence de la Cinémathèque Française


Jean Luc Godard
France, 1965, 1h55
Avec : Anna Karina, Jean-Paul Belmondo...

Pierrot le Fou c'est un petit soldat qui découvre avec mépris qu'il faut vivre sa vie, qu'une femme est une femme, et que dans un monde nouveau, il faut faire bande à part pour ne pas se retrouver à bout de souffle
Jean-Luc Godard

Dans ma vie de spectateur, il y a un avant Pierrot le fou, et un après. Pour la première fois, j’ai ressenti et entendu, à travers les images et les sons, les couleurs et le bleu de la Méditerranée, quelque chose comme la voix silencieuse d’un cinéaste poète qui me disait autre chose. (…) Ce film me disait que le monde était désordre et violence, que l’amour de Marianne pour Pierrot-Ferdinand cachait aussi la trahison, que le bleu du ciel était le même que celui dont Pierrot se peint le visage avant de mourir. Et que tout cela n’était que Beauté. Cet homme invisible qui avait pour nom Jean-Luc Godard me prenait par la main, pour m’entraîner dans une zone secrète et mystérieuse où j’avais le sentiment de n’être encore jamais allé. (…) Ceux qui ont la chance de ne jamais avoir vu ce film vont le découvrir dans sa somptuosité plastique. Ceux qui le connaissent déjà, le film faisant partie de l’histoire du cinéma et de l’histoire de l’art, conviendront qu’ils ne l’ont jamais vu aussi beau, dans sa beauté d’origine. »
Serge Toubiana



Avec Pierrot le fou, c’est comme si nous ignorions tout de Godard, de la critique et du cinéma. L’œuvre était pourtant « prévisible », qui fait sur plus d’un point la somme des neuf autres, reprenant tour à tour thèmes, situations, personnages, couleurs, propos et drames d’À bout de souffle à Bande à part, du Mépris à Une femme est une femme, mais pour mieux les laisser derrière elle. (...)



(...) La première tentation est d’isoler le film comme un accident, peut-être appelé par l’incurvation abrupte d’À bout de souffle ou l’impressionnisme douloureux de Bande à part. Approche de surfaces, détails : la coloration et le rythme nous guident plutôt, par les différences et les exceptions mêmes, vers Une femme est une femme où la disposition fissurée, fêlée, rompue, de l’exposition, au lieu de provoquer quelque régression dilate les figures, les souligne en les élargissant, visant une amplitude si démesurée que son atteinte interdit toute survivance et bascule du même coup, exténuée, en déséquilibre. Tension hésitante, intermittente, têtue, d’Une femme est une femme : sans participer d’un mouvement circulaire vouant le film à une répétition discontinue (Une femme mariée), le récit prenait le temps de revenir en arrière. Dans Pierrot le fou, les variations ne sont pas étales, divergentes, mais précipitées, répercutées. Au lieu d’être évalué, le hasard est traversé. Le mouvement transversal empêche chaque obstacle, crevant l’étendue et l’équilibre apparent qu’elle impose. Godard ne filme pas les cassures mais le vol en éclats, la succession. Non plus un dépliement, une juxtaposition, mais un accéléré. Le film raconte une seconde - bruits et couleurs apparus par mouvance, réfraction, éblouissement - et la fuite de ce qu’elle comporte, sans souci de traces ou de récupérations. (...)



(...) Comme La Forêt interdite dont il détient l’exacerbation, entre le bleu et l’atroce, Pierrot le fou possède la pulsion crispée d’une naissance, chute amorcée, vécue et rêvée, sorte d’initiation. Mais au fil de l’élan qu’il s’efforce de mettre à jour s’imprime en transparence un mouvement parallèle et contradictoire où subsistent les traînées sanglantes, les giclées écarlates dont la fréquence rappelle autant de barrières susceptibles d’empiéter sur le tracé originel, de le perturber, voire de l’arrêter. Si bien que la fuite éperdue, la traversée solitaire, semble puiser son énergie, sa conviction, de la menace qui la guette et dont le déploiement afflue par vagues subites de plus en plus pressantes, imposant les parcours secondaires, les échappatoires, les déviations. Et la course de Pierrot rattrape sa menace, ouverte à une autre chute possible, à une prochaine seconde à vivre. (...)
Jean-André Fieschi et André Téchiné
(Cahiers du cinéma n° 171, octobre 1965)












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Programmation
Martigues :



du 4 au 15 fevrier :
Pierrot Le Fou de Jean Luc Godard





du 12 au 22 février :
De Bruit et de Fureur de Jean Claude Brisseau





du 23 février au 1er mars:
Zazie dans le métro de Louis Malle





du 2 au 8 mars:
Les 400 coups de François Truffaut





Le 8 Mars : Ciné/Bistrot/Philo
"La désobéissance"
Gloria de John Cassavetes





du 9 au 15 mars
( 11 mars Atelier et Conférence)
Samia de Philippe Faucon





du 16 au 22 mars
A Bout de course de Sydney Lumet